Le Cercle - Les Echos- 23/10/2011 | MichelCastel | Politique économique

Résumé :

Les solutions françaises ou allemandes en cours de négociation sont inacceptables tantôt par les uns tantôt par les autres. Il faudrait d’urgence que les autorités européennes permettent au FESF d’intervenir sur le marché des credit default swap (CDS) souverains, comme vendeur de protections pour faire tomber la fièvre et donner du temps au temps pour des plans de redressements viables.

                                                                        

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Il faut faire tomber immédiatement la fièvre qui risque d’emporter les dettes publiques européennes. Comment y parvenir ? Les solutions françaises ou allemandes en cours de négociation sont inacceptables tantôt par les uns tantôt par les autres. On ne reprendra pas ici les éléments expliquant ce fait largement présenté par toute la presse économique.
Il faut donc essayer de dépasser cette situation de quasi blocage pour recourir à d’autres techniques qui n’impliquent pas davantage qu’aujourd’hui  la BCE et ne demandent pas une extension du volume des fonds mis à la disposition du Fonds Européen de Stabilité Financière (FESF) ni une modification de son cahier de charges.
Une des rares solutions peut-être encore possible  serait que les pays de la zone euro décident de recourir aux mêmes techniques que les marchés, à savoir des interventions sur le marché des CDS souverains. En étant vendeurs de CDS, donc de protections pour les porteurs de dettes publiques européennes, via le FESF, les Instances européennes se mettraient en travers du marché pour éviter les taux totalement insupportables qui pèsent sur un nombre toujours grandissant de pays ; taux qui participent grandement au cercle vicieux actuellement à l’oeuvre.  


Il s’agirait ainsi d’intervenir de façon concertée via le FESF, comme il arrive que les banques centrales le fassent de temps à autre sur le marché des changes pour contrecarrer des mouvements aberrants sur devises (on citera par exemple, les accords du Plazza, du Louvre...). Vendeur de protections, le FESF en augmenterait considérablement l’offre et cela en ferait fortement baiser les prix. Le risque est réel mais à la dimension du FSF actuel et il ne devrait pas avoir à jouer si les politiques de redressement budgétaires engagées sont tenues et si la gouvernance européenne décidée le 21 juillet produit bien tous ses effets de pilotage des très grands équilibres des pays membres de la zone euro. 


Il reviendrait aux experts et aux décideurs politiques ensuite de retenir le meilleur processus pour obtenir une hiérarchie raisonnable et viable des primes de risques des différents pays- celui de la Grèce serait établi après la forte réduction de sa dette  qui est cours de détermination-   et les canaux d’interventions  :  par adjudications ou à guichet ouvert à un prix déterminé par dette… à l’instar de ce que les banques centrales font depuis 4 ans maintenant pour assurer la liquidité interbancaire lors de leurs interventions traditionnelles et/ou  non conventionnelles ; en intervenant seul ou par le biais de quelques établissements travaillant sous mandat.
Ayant alors une offre abondante de couverture de risques, le volume et le niveau des taux des nouveaux emprunts  -pour faire face aux remboursements des emprunts à échoir-   redeviendraient satisfaisants et les besoins de renforcement en fonds propres des banques en seraient ou diminués ou leur efficacité grandie d’autant,  puisque disposant d’une importante offre de couvertures de leurs risques sur dettes publiques en portefeuille.


Les Européens joueraient ainsi un rôle d’assureur non discriminant entre les dettes anciennes et futures ou entre les pays. Certes ils prendraient des risques mais sans doute beaucoup efficacement que quand ils agissent a posteriori en étant obligés de ratifier, contre leur gré, ce que les marchés ont produit.  Et comme toute assureur qui touche une prime, celle-ci est adéquate si, et surtout si, les assurés ont des comportements responsables et s’ils ne présentent pas des risques intrinsèquement non assurables. C’est le cas de la zone euro qui reste la zone du monde où le total des dettes publiques et des dettes privées est le moins élevé ; et c’est aussi le cas parce que la crise aura obligé les pays membres à beaucoup mieux coordonner leurs politiques à l’avenir avec des tableaux de bord autrement plus complets que ce qui prévalait depuis l’instauration de l’euro .    
Comme au judo, utilisons la force et les armes de l’autre (le marché) pour mieux lui résister, voire pour lui permettre de mieux fonctionner en empêchant ses emballements !