Vox-Fi -par Hubert de Vauplane - 19 mars 2015

Commentaire :

L'article d'Hubert de Vauplane montre bien que le vieux cadre institutionnel bancaire dans lequel nous avons vécu a du plomb dans l'aile tant dans sa réalité que dans son essence.
C'est vrai que tout l'argumentaire que les autorités monétaires et les Pouvoirs Publics pouvaient développer avec beaucoup de cohérence  pour justifier du monopole des dépôts et des crédits est aujourd'hui mis à mal ; on ne le fera pas ici il faudrait tout un article. Cet argumentaire n'était pas spécifique à la France (même si notre pays a été maximaliste dans ses prises de position avec par exemple la prise en compte des garanties dans le champ du crédit); à preuve les directives bancaires européennes dont la première de 1977, dite de coordination bancaire, visait l'obtention obligatoire d'agréments.
Dans la plupart des pays de l'Union Européenne  le crédit entrait dans le champ des acteurs qui devaient obtenir un agrément ; pas celui de banque s'ils ne collectaient pas de dépôts, mais  celui d'établissement de crédit, concept introduit dans la première directive précitée. 
Et c'était une notion de crédit au sens large qui dans la majorité des pays incluait le crédit à la consommation mais aussi le crédit-bail immobilier et parfois le crédit-bail mobilier, l'affacturage et le crédit à la consommation. La seule grande exception était le Royaume-Uni qui exonérait de réglementation notamment tout le crédit-bail et le crédit à la consommation.
Sur ces bases généralement partagées, un grand marché bancaire européen largement harmonisé - pas totalement-  quant à son périmètre et sa réglementation a été mis en place  dans les années 90, avec instauration de passeports européens pour renforcer la concurrence dans ce marché bancaire unique et contrebalancer les contraintes liées aux respects de règles prudentielles contraignantes. Le tout fonctionnant sous la "haute main " des banques centrales, qui contrôlant via le crédit entre 80 et 85 % du financement des économies de l'Europe continentale, estimaient avoir toutes les cartes en main pour éviter les pires des dérapages monétaires et financiers. La Bundesbank a été très longtemps particulièrement attachée à une telle donne et n'a que, contrainte et forcée, été obligée de l'abandonner avec la déréglementation financière et la montée généralisée des marchés au début des 2000.   
  
    Ainsi aujourd'hui ces bases tiennent de moins en moins bien dans un environnement :
- de déréglementation poussée (Bâle III ne gêne plus que ceux qui veulent rester avec un statut qui les y soumet ! on va finir par se demander pourquoi ils le gardent !),
- dans lequel les banques centrales poussent elle-mêmes (provisoirement ?) à une très forte création monétaire,
 - et de développement considérable du face à face des marchés et des effets de levier.
 Au temps du shadow banking, de la banalisation des opérateurs des paiements scripturaux, du crowd funding...comment pourrait-il en être autrement ? ...pour le plus grand bien  de risques systémiques.
Tout se passe en effet comme s'il était avéré que leur maîtrise était bien meilleure dans un tel environnement de dissémination généralisée des risques auprès d'acteurs pas ou peu réglementés que dans un système canalisé auprès d'acteurs réglementés (qui n'en présentent pas moins quelques fragilités et risques de dérives).
 
Permettez-moi d'en douter. Seul le temps permettra d'en juger.