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Mot-clé - Désintermédiation

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vendredi, 5 juin 2015

"La discrète américanisation" de l'Europe des capitaux

Les Echos- 21/05/2015-  Eric Le Boucher -éditorialiste

" L’union européenne du marché des capitaux est sur les rails. Elle doit aboutir, comme aux Etats-Unis, à atténuer le poids des banques dans le fonctionnement de l’économie. Un tournant historique qui eût mérité un débat."

mon commentaire :

La poursuite accélérée de la désintermédiation en Europe, à l’instar du système américain, voulue et saluée par presque tout le monde se révélera très certainement extrêmement dangereuse à terme. Il est bon qu'Eric Le Boucher invite à y réfléchir sérieusement. C 'est en effet un modèle de financement aux cycles économiques très contrastés, gérable quand il était limité aux pays anglo-saxons, qui le sera beaucoup moins quand il aura été généralisé. Sur une longue période, banques et marchés sont à égalité dans la pertinence de l’analyse du risque microéconomique. Par contre, la maîtrise du risque macroéconomique est moindre quand les marchés assurent l’essentiel des financements et des risques.
L’atomisation des risques, leur couverture et le succès apparemment durable anesthésient longtemps les acteurs et les observateurs… jusqu’à leur réveil.
Et là, c’est une déferlante, en temps réel, face à laquelle on ne sait pas faire face, pas plus demain qu’hier, malgré les dispositifs prudentiels récemment mis en place.

lundi, 23 mars 2015

Le monopole bancaire sert-il (encore) à quelque chose ?

Vox-Fi -par Hubert de Vauplane - 19 mars 2015

Commentaire :

L'article d'Hubert de Vauplane montre bien que le vieux cadre institutionnel bancaire dans lequel nous avons vécu a du plomb dans l'aile tant dans sa réalité que dans son essence.
C'est vrai que tout l'argumentaire que les autorités monétaires et les Pouvoirs Publics pouvaient développer avec beaucoup de cohérence  pour justifier du monopole des dépôts et des crédits est aujourd'hui mis à mal ; on ne le fera pas ici il faudrait tout un article. Cet argumentaire n'était pas spécifique à la France (même si notre pays a été maximaliste dans ses prises de position avec par exemple la prise en compte des garanties dans le champ du crédit); à preuve les directives bancaires européennes dont la première de 1977, dite de coordination bancaire, visait l'obtention obligatoire d'agréments.
Dans la plupart des pays de l'Union Européenne  le crédit entrait dans le champ des acteurs qui devaient obtenir un agrément ; pas celui de banque s'ils ne collectaient pas de dépôts, mais  celui d'établissement de crédit, concept introduit dans la première directive précitée. 
Et c'était une notion de crédit au sens large qui dans la majorité des pays incluait le crédit à la consommation mais aussi le crédit-bail immobilier et parfois le crédit-bail mobilier, l'affacturage et le crédit à la consommation. La seule grande exception était le Royaume-Uni qui exonérait de réglementation notamment tout le crédit-bail et le crédit à la consommation.
Sur ces bases généralement partagées, un grand marché bancaire européen largement harmonisé - pas totalement-  quant à son périmètre et sa réglementation a été mis en place  dans les années 90, avec instauration de passeports européens pour renforcer la concurrence dans ce marché bancaire unique et contrebalancer les contraintes liées aux respects de règles prudentielles contraignantes. Le tout fonctionnant sous la "haute main " des banques centrales, qui contrôlant via le crédit entre 80 et 85 % du financement des économies de l'Europe continentale, estimaient avoir toutes les cartes en main pour éviter les pires des dérapages monétaires et financiers. La Bundesbank a été très longtemps particulièrement attachée à une telle donne et n'a que, contrainte et forcée, été obligée de l'abandonner avec la déréglementation financière et la montée généralisée des marchés au début des 2000.   
  
    Ainsi aujourd'hui ces bases tiennent de moins en moins bien dans un environnement :
- de déréglementation poussée (Bâle III ne gêne plus que ceux qui veulent rester avec un statut qui les y soumet ! on va finir par se demander pourquoi ils le gardent !),
- dans lequel les banques centrales poussent elle-mêmes (provisoirement ?) à une très forte création monétaire,
 - et de développement considérable du face à face des marchés et des effets de levier.
 Au temps du shadow banking, de la banalisation des opérateurs des paiements scripturaux, du crowd funding...comment pourrait-il en être autrement ? ...pour le plus grand bien  de risques systémiques.
Tout se passe en effet comme s'il était avéré que leur maîtrise était bien meilleure dans un tel environnement de dissémination généralisée des risques auprès d'acteurs pas ou peu réglementés que dans un système canalisé auprès d'acteurs réglementés (qui n'en présentent pas moins quelques fragilités et risques de dérives).
 
Permettez-moi d'en douter. Seul le temps permettra d'en juger. 



lundi, 1 décembre 2014

Les entreprises françaises apprennent à se passer des banques

La Tribune du 30/11/2014 -article de Christine Lejoux

commentaire repris pour un article dans La Croix du 19 février 2015 " La commission européenne veut relancer la titrisation pour aider les PME à se financer"


Les marchés vont prendre une place croissante dans le financement des entreprises européennes, compte tenu des contraintes réglementaires qui restreignent la capacité des banques à prêter. Les banques ne pèsent plus que 60% dans le financement des sociétés françaises. De nouveaux acteurs, comme les fonds de prêt à l'économie, surfent sur cette vague de la désintermédiation du financement des entreprises.

mon commentaire :

La poursuite accélérée de la désintermédiation en Europe, à l’instar du système américain, voulue et saluée par presque tout le monde se révélera très certainement extrêmement dangereuse à terme. C 'est en effet un modèle de financement aux cycles économiques très contrastés, gérable quand il était limité aux pays anglo-saxons, qui le sera beaucoup moins quand il aura été généralisé. Sur une longue période, banques et marchés sont à égalité dans la pertinence de l’analyse du risque microéconomique. Par contre, la maîtrise du risque macroéconomique est moindre quand les marchés assurent l’essentiel des financements et des risques.
L’atomisation des risques, leur couverture et le succès apparemment durable anesthésient longtemps les acteurs et les observateurs… jusqu’à leur réveil.
Et là, c’est une déferlante, en temps réel, face à laquelle on ne sait pas faire face, pas plus demain qu’hier, malgré les dispositifs prudentiels récemment mis en place.

dimanche, 15 décembre 2013

Finance et économie : La fracture

Entretien réalisé par Olivier PIOT le 2 avril 1995 et publié dans le livre Finance et économie, la fracture. Le Monde Editions, 1995.









Rectificatif

Il aurait été logique qu'après le krach de l'Union Générale les contrats d'argent à terme, comme je l'ai dit, aient été interdits. En fait ils ont été légalisés par une loi du 28 mars 1885 !. Son article 1 stipule:

"Tous marchés à terme sur effets publics et autres, tous marchés à livrer sur denrées et marchandises sont réputés légaux". Mais cette légalisation n'était pas tant pour les encourager que pour moraliser ces transactions. En effet beaucoup de débiteurs ne voulant pas essuyer une perte sur les contrats perdants faisaient un procès à leurs créanciers en excipant de l'exception de jeu. D'où la suite de cet article "Nul ne peut, pour se soustraire aux obligations qui en résultent, se prévaloir de l'article 1965 du code civil, lors même qu'ils se résoudraient par le paiement d'une simple différence". Cet article 1965 stipule que "La loi n'accorde aucune action pour une dette du jeu ou pour le paiement d'un pari".

On peut lire avec intérêt le livre " L'exception de jeu en matière d'opérations de bourse" par Numa Salzedo, avocat à la cour de Paris- 1880- BnF- Gallica.

Au début des années 1980, " le cadre juridique permettant la création d'un marché à terme digne de ce nom n'existait pas ...Il a fallu passer par une loi de modernisation permettant de lever l'exception de jeu . Celle-ci sera adoptée le 11 juillet 1985." Citation de Gérard Pfauwadel, ancien Président du Matif, dans un article de La Tribune du 26 juillet 2013 " Les traders du Matif aux couleurs de chaque intermédiaire" 

jeudi, 30 mai 2013

Réactions au Livre vert de la Commission Européenne sur le financement à long terme de l’économie européenne

Communiqué de presse
Bruxelles, le 25 mars 2013

http://europa.eu/rapid/press-release_IP-13-274_fr.htm?locale=fr

La Commission européenne présente le livre vert sur le financement à long terme de l’économie européenne

"La Commission européenne a adopté aujourd'hui un livre vert qui lance une consultation publique d'une durée de trois mois sur la manière d'accroître l'offre de financement à long terme et d'améliorer et de diversifier le système d'intermédiation financière pour l'investissement à long terme en Europe (...)".


Mes réactions transmises à la Commission le 27 mai :

Depuis le début des années 80, le financement des économies par un recours accru aux opérations de marché a été privilégié dans tous les pays de l’OCDE. Pendant longtemps, aux dires de responsables et d’experts, ce choix aurait permis une croissance économique mondiale exceptionnelle. Depuis la crise est passée et on voit combien, certes avec un effet retard mais non moins violent, le prix économique et social pour ne pas dire sociétal qu’il en coûte et qu’il en coûtera pendant encore quelques années d’un tel choix.

De nombreux prosélytes, personnes physiques ou institutions et/ou politiques, après avoir œuvré  à ce basculement du crédit vers les marchés, en sont venus à dire que titrisation,  CDS,  activités pour compte propre…  n’auraient pas dû être autant encouragés. En conséquence, et en logique, avec cette analyse, sous l’impulsion du G.20, un nouveau cadre institutionnel (loi Dodd-Frank aux USA, nouvelles autorités de surveillance dans l’U.E) et prudentiel (Bâle 2 devenant Bâle 3) a été dessiné ou se dessine pour renforcer la robustesse des systèmes  bancaires et financiers. Toutes ces dispositions visent à mieux encadrer le poids des risques de marché et leurs éventuels effets systémiques sur les systèmes bancaires qui sont et resteront les relais incontournables du financement du tissu économique ordinaire, les gardiens de la valeur d’une part importante de l’épargne et les gestionnaires des systèmes de paiement scripturaux sans lesquels les économies modernes ne pourraient plus fonctionner.
Or la crise perdurant et les effets induits de ces nouveaux dispositifs réglementaires institutionnels qui commencent à se faire sentir font que des problèmes de financement des entreprises petites et moyennes et des investissements durables de long terme sont évidents dans l’ensemble de l’union. Les chiffres de la BCE en attestent. Ces mêmes personnes ou institutions qui après la crise s’étaient réorientées vers moins de marché et plus de régulation  reviennent aujourd’hui à leurs premières amours, à savoir chercher le graal par plus de marchés pour palier la faiblesse des financements bancaires. 

C’est dans ce nouvel environnement de pensée que s’inscrit notamment ce Livre vert de la Commission Européenne.
 Partir du constat que « depuis la crise financière, le secteur financier en Europe n'a plus la même capacité à acheminer l'épargne vers le financement à long terme et dire qu’il est donc essentiel de réfléchir aux moyens d'accroître la disponibilité des financements à long terme par les marchés » c’est vouloir bâtir, à partir de la situation présente, une nouvelle architecture durable de financement sur un a priori fort discutable selon moi.
Comme pour l’emploi, constater que l’octroi du crédit par les banques aux entreprises et plus généralement aux financements à long terme est en grande difficulté est aussi faux que de  dire comme l’ont dit des hommes politiques « qu’on a tout fait  pour l’emploi ». J’y reviendrai en fin de contribution.

Ces propos ne signifient pas que je suis contre le fait de faire une place aux financements de marché, mais je suis pour qu’on donne leur juste place. C'est-à-dire une architecture financière qui ne soit pas conçue seulement pour pallier la faiblesse de l’offre bancaire – qui deviendrait structurelle-  mais qui, avec une offre bancaire durablement revitalisée, apporterait  un supplément de financement et/ou une meilleure allocation des risques en fonction des besoins réels des agents économiques non financiers. On ne saurait approuver sans autre forme de procès un projet qui ne chercherait pas  une optimisation des deux canaux de financement que sont le crédit et les marchés de titres négociables et qui en fait, comme dans le projet de la Commission, part du postulat que le crédit va durablement perdre de son importance.  
Ce n’est pas le paragraphe commençant par « Bien entendu, les banques ne disparaîtront pas de la chaîne d'intermédiation en Europe. (…).  Mais dans le contexte des évolutions qui ont affecté le secteur bancaire depuis la crise, on assiste à l'émergence de nouveaux besoins et de nouvelles possibilités, pour d’autres intermédiaires, de compléter le rôle des banques en mettant à disposition d'une manière plus équilibrée des financements d’investissements à long terme » qui sera de nature faire changer d’avis. D’une part, l’orientation pour plus de marché est déjà le discours ambiant et les stratégies bancaires déployées vont dans ce sens. D’autre part, rien de ce qui est préconisé  dans le Livre vert n’apporte un début de dispositions ou à tout le moins de propositions pour aider ou  inciter les banques à renforcer l’octroi de financements longs.

Soyons clairs, le tout crédit est aussi inefficient et aussi dangereux que le tout marché. Ce qui compte est de rechercher un équilibre subtil, forcément évolutif, entre le crédit et les marchés avec le capital–risque comme passerelle pour dynamiser ces deux segments de financement. Et sauf démonstration contraire, que je ne connais pas, il n’apparaît pas que sur longue période les résultats économiques et sociaux des pays à financement prépondérant par le crédit soient inférieurs aux pays dans lesquels ce sont les financements de marchés qui sont prépondérants. Et, sur des horizons beaucoup plus courts - 5 à 7 ans au maximum- si la prépondérance des marchés semble plus efficiente que celle de l’intermédiation bancaire, cette dernière n’ajoute pas la volatilité et l’instantanéité des marchés aux risques intrinsèques à tout financement. Et c’est une donnée essentielle qu’il faut intégrer avant de préconiser le fort développement de techniques et d’instruments de marché.

Le canal du crédit n’est pas sans défaut mais celui de la marchéïsation non plus. A égalité pour l’analyse du risque microéconomique, la maitrise du risque macro-économique est moindre quand les marchés assurent l’essentiel des financements et des risques. L’atomisation des risques, leur couverture et le succès apparemment durable anesthésient longtemps les acteurs et les observateurs …jusqu’à leur réveil. Et là, c’est une déferlante face à laquelle on ne sait pas faire face.
Un exemple alors même que cela ne touchait qu’un seul pays. En août 1982 le Mexique endetté de 100 milliards de dollars sous forme de crédits ne pouvait plus payer ses intérêts ni faire face à l’amortissement de sa dette. Après plusieurs mois de négociation avec les banques et le FMI un plan de redressement a été établi. En 1994, ce pays à nouveau en grande difficulté, la BRI a dû mettre 50 milliards sur la table en 24 h pour éviter  l'effondrement complet les obligations mexicaines ! Même gravité des problèmes mais délais extraordinairement différents; de plusieurs mois à de la quasi instantanéité. Aussi je réitère mon assertion : l’intermédiation bancaire, même si elle commet des erreurs, n’ajoute pas la volatilité et l’instantanéité des marchés aux risques intrinsèques à tout financement. Ce point est essentiel pour limiter les risques systémiques. Or le Livre vert ne peut pas ne pas prendre en considération cette dimension systémique surtout quand il préconise des orientations de long terme difficilement réversibles par ailleurs.

Dans ce qui vient d’être dit il est important de préciser que c’est tout particulièrement vrai des titres de dettes négociables et de tous leurs dérivés. La problématique est différente pour le marché des actions. Les marchés d’actions sont certes également très volatils mais à eux seuls ils n’ont pas de dimension systémique. Et contrairement aux marchés de dettes qui ont cette dimension systémiques alors qu’ils peuvent être très largement remplacées par du crédit non soumis au mark to market, les marchés d’actions ont un rôle indispensable moins de financement (sur un plan macro-économique s’entend et non micro-économiquement) que de lieu de modification du pouvoir actionnarial des entreprises cotées notamment à l’occasion d’OPA. 

De ces données assez factuelles, il me parait regrettable de constater que le Livre vert mette autant en avant cette préférence pour les marchés au détriment du rôle classique des banques et plus spécialement du crédit.
L’orientation générale retenue dans le Livre vert entérine la dérive des banques depuis le début de ce millénaire vers une activité de plus en plus de simples prestataires de services en en faisant des opérateurs «  originate to distribute », rémunérés par des commissions  au détriment de leur  rôle fondamental de mutualisation des risques en les conservant dans leurs bilans (originate to hold ). Dérive dont on a pourtant déjà vu les effets depuis 2007 et qu’une bonne partie des nouveaux dispositifs prudentiels, se voulant pourtant correcteurs, renforce indirectement, peut-être même sans l’avoir voulu.

Si les propositions du Livre vert qui sont présentées le sont pour acclimater ou développer  raisonnablement certains produits ou techniques de marché, elles sont bienvenues. Par contre,  ce que je conteste c’est l’optique générale dans laquelle elles sont faites, à savoir  une poursuite accélérée de la désintermédiation en Europe, à l’instar du système américain qui n’est pas forcément le meilleur modèle à imiter servilement. En effet, ce qui est bon pour un ou quelques pays n’est pas forcément bon pour des pays d’économie sociale de marché comme le sont les pays européens. Pays qui n’ont pas, pour la plupart, l’esprit du farwest ni de la faillite civile avec la possibilité de se refaire comme culture de leurs peuples et comme mode de régulation !  De plus ce modèle aux cycles économiques très contrastés (très forts stop and go) qui restait gérable quand il était limité aux pays anglo-saxons le sera beaucoup  moins quand il aura été généralisé, non seulement à l’Europe, non seulement aux pays de l’OCDE, mais aussi  très prochainement à toute la planète.
Venons-en à une présentation plus précise des griefs que je formule à l’encontre d’un renforcement excessif du rôle des marchés. Celle-ci sera volontairement brève, les lecteurs de ce papier étant suffisamment avertis de la chose financière pour qu’il ne soit pas nécessaire de faire de grandes et longues démonstrations.

J’indiquais plus haut que L’intermédiation bancaire, même si elle commet des erreurs, n’ajoute pas la volatilité et l’instantanéité des marchés aux risques intrinsèques à tout financement. Ce point est essentiel pour limiter les risques systémiques.
En effet, quand on aura marchéïsé très fortement les financements on aura :
-plus de volatilité et d’ampleur encore dans les chocs économiques et financiers – le modèle américain a ses limites en cas de généralisation (cf. supra) ;
- une très forte démutualisation des signatures des emprunteurs. L’essentiel des PME et TPE qui n’ont pas et n’auront pas accès au marché malgré les propositions avancées (celles-ci  ne bénéficieront au mieux qu’aux entreprises de taille intermédiaire),  dépendront plus encore qu’aujourd’hui  de banques asséchées des bonnes signatures. Les nouveaux canaux de financement souhaités resteront nécessairement très modestes pour ne pas dire anecdotiques pour les TPE.  Pour les entreprises de taille intermédiaire elles risquent de détériorer leur relation avec leur(s) banque(s) en allant chercher épisodiquement des ressources sur les marchés alors qu’elles ont besoin et auront toujours  besoin de celle(s)-ci pour passer les moments difficiles ; 
- une déformation des circuits de l’épargne au profit de produits de marché. Les épargnants supporteront directement les risques de défaillance et les risque de taux alors que l’épargne intermédiée bénéficie de la protection du nominal. Les effets de richesse risquent d’être  redoutables y compris dans des pays qui ne connaissaient pas ce type de fragilité;
- des banques centrales obligées d’intervenir sur les marchés dans des proportions encore beaucoup plus grande qu’aujourd’hui par des achats fermes avec des risques de monétisation considérables.


Aussi proposerai- je quatre grands principes sur lesquels le nouvel environnement financier   devrait s’appuyer par une régulation appropriée pour trouver un bon équilibre entre intermédiation et marchés:
 
-1-  Ne pas de facto favoriser une réglementation prudentielle la sortie des risques des bilans bancaires alors que la dissémination des risques après du shadow banking qui reste, quoi qu’on ait décidé les concernant depuis 3 ans, non réglementé prudentiellement ;
- 2- Limiter la titrisation à la partie des crédits dont la durée restant à courir est compatible avec des horizons de marchés profonds et liquides pour limiter l’aléa moral d’un développement excessif du « originate to distribute » ;
- 3- Favoriser une offre de produits d’épargne bancaires performants plutôt qu’orienter l’épargne vers des produits de dettes négociables surtout lorsqu’ils comportent des risques en capital « non capés » pouvant être dévastateurs en termes d’effets de richesse ;
- 4- Permettre un refinancement privilégié ( en accès et en taux) auprès de la BCE et/ou des banques centrales parties prenantes du SEBC des crédits correspondant au financement de la transition énergétique et environnementale ainsi que de grands projets d’intérêt commun décidés par l’union Européenne.
On s’arrêtera un instant pour développer cette proposition. La BCE pourrait dès maintenant annoncer le lancer prochain d’un nouveau plan de refinancement à moyen terme des banques- pour 5 à 7 ans au moins- pour compenser la fin prochaine des deux plans de ce type lancés fin 2010. Mais il faut cette fois qu'elle y instille une certaine sélectivité en ciblant ces refinancements au profit de crédits nouveaux finançant la transition énergétique et écologique ainsi que de grands projets d'infrastructure d'intérêt national et/ou européen réalisés en conformité avec un grand plan européen décidé en la matière. Cela aiderait à la croissance et contrebalancerait en partie l'effet très fortement négatif des exigences de liquidité et de renforcement de fonds propres imposés par Bâle 3. Avec l'Union bancaire européenne, la BCE est maintenant en charge du contrôle des banques systémiques de l'UE. Analyser leur prise de risques et la façon dont elles contribuent on non au bon financement des économies européennes et donc à la robustesse de leur environnement doit être maintenant dans son cahier des charges. Et ce au même titre que la surveillance de l'inflation, sauf à laisser prospérer des risques financiers, économiques et sociaux non maitrisables pourtant de son ressort.
                                                                             *
                  Au total, les orientations du Livre vert ne sont pas sans comporter de sérieuses ambiguïtés sur la qualité de l’architecture financière qu’elles se proposent d’établir pour le financement des investissements à long terme. Elles vont contribuer à accroître  la démutualisation des risques et le champ de la volatilité inhérente aux marchés. Cela fragilisera encore un peu plus le cœur du métier des banques, à savoir le crédit conservé dans leurs bilans sans avoir aucune certitude que les nouveaux instruments ou canaux de financements irrigueront de façon plus
que symbolique les TPE, les entrepreneurs individuels et les professions libérales. 

 


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