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lundi, 1 mars 2010

Des dettes publiques au péril de fonds vautours


Analyse, publié le 01/03/2010
"Des dettes publiques au péril de fonds vautours "

De nouveaux opérateurs sur les marchés des créances et de nouvelles techniques -les CVS- font que les plans de redressement de pays (généralement pauvres) sont mis en péril alors même que la communauté financière internationale peut y avoir apporté capitaux et appuis humains. La situation prend une tournure qui fait qu'il faudrait étendre la procédure du règlement judiciaire aux Etats pour leur donner une protection semblable à celle qui existe pour le secteur privé.


Suite à l'article récent d'Alain Gauvin "Les-Etats-à-la-merci-des-fonds-vautours"  -cf références infra- on ne peut se contenter des commentaires lus sur le site des Echos.

Si une partie du monde a profité de la mondialisation il y a près d'une centaine de pays pauvres qui n'en tirent pas les fruits et sont même de plus en plus marginalisés. Certes, tous ne sont pas exempts de critiques, mais n'oublions pas que même chez nous, pays riches, la montée de la pauvreté est constante et qu'elle ne touche pas que des gens qui le veulent bien, comme il est parfois dit. L'extrême performance de certains (pays, individus) provoque au moins pendant quelque temps la marginalisation des autres (pays, individus).

Les fonds vautours ou « vulture funds » sont des fonds qui rachètent à des prix extrêmement bas des créances sur des pays pauvres, en situation financière difficile, pour les obliger à payer la valeur nominale majorée des intérêts moratoires, y compris en usant et abusant de procédures judiciaires. Avec ces fonds vautours, nouveaux venus - en fait ils sont actifs depuis une quinzaine d'années - une faille de plus existe dans le traitement des dettes publiques et tout particulièrement celles des pays les plus pauvres peu en état de mobiliser des armées de juristes pour se défendre.

Alors que depuis la crise du Mexique de 1982 notamment, Club de Paris (pour les prêteurs publics, et Club de Londres (pour les créanciers privés et plus précisément les banques) agissent assez efficacement en amont et en aval des actions du FMI et de la Banque mondiale, on a des francs tireurs, non réglementés, qui essaient de tirer les marrons du feu dans des proportions totalement indues, forts de leur puissance financière et juridique. Rachetant à vil prix des obligations sur le marché secondaires des titres de pays à la limite de la cessation de paiements, ils produisent leurs créances pour la valeur nominale augmentée d'intérêts qui peuvent bloquer un temps l'intervention du FMI, et agissent après cette intervention par voie judiciaire. L'ampleur de leur créance fait que souvent cela leur permet de s'approprier de facto une partie des aides multinationales accordées - sous condition parfois draconiennes- pour le redressement du pays en difficulté.
"Une restructuration en bonne et due forme des dettes est mise en péril par les menaces formulées par une minorité (quelques créanciers) d'entamer des poursuites en justice" Anne Kruger, First Deputy Managing Director du FMI - 2OO2.

Plus grave encore, les créanciers classiques -banques et autres fournisseurs- risquent à leur tour de se mettre à avoir des comportements voisins de ces fonds par le recours aux credit default swap qui leur permet de se couvrir contre leurs risques - dont les risques souverains (voir à ce titre la montée des volumes et les primes des CDS sur les différents pays de la zone euro depuis un peu plus d'un an). Bien que couverts, ces créanciers restent toujours les créanciers en titre et vont produire leurs créances. Ils n'ont de facto pratiquement plus intérêt à contribuer à un plan de redressement puisque leur couverture ne fonctionnera que si la défaillance est avérée; cette protection sera meilleure que ce qu'ils pourraient récupérer par leur accord à un plan d'apurement du passif et de redressement.

Dès lors , une idée de nombreuses fois évoquée - y compris au sein des Instances internationales- à la fin des années 90 et début des années 2000 mais toujours restée sans suite va finir par devoir s'imposer. Elle est reprise par Alain Gauvin dans son article. Il s'agit d'étendre les procédures de règlement judiciaire aux Etats alors que seul le secteur privé peut jusqu'à maintenant en bénéficier.
Sous l'autorité d'un juge - ce serait ici le FMI et sans doute la Banque Mondiale- tous les créanciers seraient contraints d'accepter les plans d'apurement et de redressement élaborés en concertation avec la majorité des créanciers et validés par ce "juge".

De nombreuses objections seront élevées. Elles doivent être mises en balance avec les engagements multinationaux de soutien aux pays les plus pauvres et de lutte contre les sources d'instabilité politique et sociale locale, régionale voire mondiale. Dans cette problématique, un point technique, modeste en apparence peut néanmoins contribuer à provoquer son rejet par le secteur bancaire fortement concerné par un tel dispositif. Gageons que son attitude serait beaucoup plus ouverte si les autorités prudentielles acceptaient de ne pas l'obliger,en raison de l'ouverture d'une procédure de règlement judiciaire, à classer ces créances en créances douteuses à provisionner au maximum. Une bonne raison permettant aux autorités d'aller dans ce sens : dans une telle procédure collective, les plans d'apurement et de redressement ainsi homologués par le FMI sont censés être viables et ce d'autant plus qu'il n'y aurait plus le risque de voir quelques créanciers mercenaires obtenir par décisions judiciaires des paiements postérieurs prohibitifs ou des appropriations d'actifs tout aussi dommageables.

Le renforcement récent de la légitimité du FMI par la révision des droits de votes, le renforcement de ses moyens d'interventions financiers ainsi que sa nouvelle mission de veille macroprudentielle que le G2O lui a confié sont autant d'opportunités et de raisons pour que celui-ci se saisisse officiellement de cette question.

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