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Mot-clé - solidarité européenne

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jeudi, 20 octobre 2011

Les banques US face à la Grèce, une exposition gérable

L' Echo- 19 octobre 2011

   

Les grandes banques américaines ont profité de la publication de leurs résultats pour annoncer leur exposition à l'Europe, et plus particulièrement la Grèce, qu'elles assurent gérable.

mon commentaire :

Les banques américaines ont des créances sur les Etats de l'Union Européenne mais disent s'être très largement couvertes. On ne peut pas imaginer que leurs contreparties soient des banques européennes... Celles-ci ont dû également se couvrir ou alors elles ne vivent pas sur la même planète.

Alors qui sont les contreparties? Ou est passé le mistigri ? Qui joue des prises de position spéculatives pour amplifier les possibilités de gains et qui a vraiment pris ces risques pour de bon en espérant que les contribuables paieront ? Pourvu que derrière eux ce ne soit pas en partie des produits d'épargne détenus par des ménages et gérés par des institutionnels qui les portent. Sinon ces gestionnaires leur révéleront le résultat dans quelques mois au vu des chiffres de fin d'année. S'ils y gagnent en rémunération c'est eux comme contribuables qui auront payé ce surplus ! S'ils perdent parce que les couvertures vendues seront actionnées, ils paieront deux fois, et comme épargnants et comme citoyens car leurs économies seront durement touchées.

vendredi, 12 novembre 2010

Dette souveraine : vers la création d'un mécanisme européen de défaut maîtrisé

Les Echos- le 12/11/2010


Le think tank Bruegel appuie Berlin et propose de faire endosser aux banques leur part du risque de défaut des membres de la zone euro. Objectif : permettre des restructurations ordonnées des dettes souveraines.


commentaire :

Les arguments de Patrick Artus et de Jacques Cailloux ne peuvent pas être rejetés sans autre forme de procès.

Toutefois un tel dispositif de restructurations de dettes, qui emprunte largement aux procédures de plans redressement privés, est souhaitable. Par contre il ne saurait être envisagé que pour des emprunts futurs, pas pour ceux qui sont en cours. Toute ambiguïté doit être levée en la matière.


Agir différemment, ce serait revenir sur la sécurité des créanciers actuels qui ont prêté à des pays censés être bien gérés dans le cadre de la zone euro et triple A. Créanciers qui, lors de la tourmente, ont obtenu la création du Fonds de stabilité de 700 milliards pour les sécuriser. Laisser planer maintenant le doute sur la valeur de leurs créances ce serait remettre en cause les résultats des stress tests effectués à juste titre, à l’époque, sans décote pour les risques souverains. Ce serait fragiliser les banques européennes et handicaper l’Union Européenne sur les marchés.

mercredi, 23 juin 2010

Que faire des dettes publiques dans la zone euro ?

Le Cercle Les Echos - 22/06/ 2010

Pour sauvegarder l'unité de la zone euro et redresser la situation de pays d'autant plus touchés par la crise qu'ils avaient déjà avant celle-ci une dette publique ou privée très forte, le FMI et les pays membres de la zone euro (plus deux) déploient soutiens financiers considérables et s'engagent tous dans des plans de rigueur conséquents. Cela suffira t-il ? Ne faudrait-il pas aussi engager une restructuration de la dette publique des pays dont la situation est la plus dégradée financièrement? Est-ce possible, est-ce souhaitable ?

"Europe : échange dette "bleue" et dettes "rouges" contre réformes". Sous ce titre, Jacques Delpla développait il y a quelque temps une proposition que l'on pourrait résumer schématiquement dans les termes suivants.

La crise actuelle de la zone euro est d’abord et avant tout une crise de compétitivité des pays périphériques, dont les prix, salaires et coûts ont augmenté beaucoup plus que leur productivité. Pour leur donner du temps et des chances de succès, l’auteur, Jacques Delpla, propose un échange de leur dette publique en dette senior (Bleue) et en dette junior (Rouge), sans paiement d’intérêt pendant 10 ans sous condition de réformes majeures. En contrepartie, les pays de l’UE (Allemagne et France surtout) accepteraient de garantir la dette Bleue des pays dits "périphériques". Les pays garants auraient un droit de veto sur les soldes budgétaires de ces pays tant que leur dette Bleue zéro coupon ne sera pas remboursée, ainsi qu’un droit de regard sur les réformes structurelles.

L’idée est séduisante, elle fait penser à un plan de redressement pour une entreprise en difficulté.

Dans de tels plans les créanciers doivent accepter des reports d’intérêt et/ou des réductions de taux, voire des réductions de dettes. Les dirigeants doivent parfois modifier une partie de l'actionnariat, mais toujours changer de politique, trouver de nouveaux débouchés et produits, réduire très fortement les coûts dont essentiellement les charges sociales par compression des salaires et allègement des effectifs suite à la recherche de gains de productivité et le fait que le chômage partiel ne suffit généralement pas à traiter les sur-effectifs et les reconversions qu’ils créent et que le temps de la conversion réussie est forcément long.

Sauf qu' ici il ne s’agit pas d’une seule entreprise (ici un seul Etat) mais de plusieurs (entreprises ou Etats) qui sont en difficulté et dont ne sait même pas si de nouvelles entités ne pourraient à leur tour le devenir assez rapidement ; les difficultés cantonnées à la périphérie du groupe se rapprochent dangereusement des entreprises (des Etats) qui en constituent le centre. Et ce groupe est en fait un conglomérat qui s’est constitué, assez classiquement comme la plupart des conglomérats, progressivement, au fil des évènements, des opportunités ou même des menaces. Un conglomérat très disparate aux échanges intra-groupes importants, aux positionnements vis-à-vis des marchés extérieurs très contrastés et dont finalement l’actionnariat ultime (les responsables) est (sont) incapable(s) d’avoir une politique s’imposant aux différentes baronnies (ici sûrement légitimes d’ailleurs) que constituent ces entreprises (Etats) qui au fil du temps se sont maintenues, voire se sont renforcées. Au point que devant les efforts énormes à consentir pour sauver le groupe, certaines entités les plus importantes et les plus solides et leurs dirigeants se demandent, ou pourraient se demander, si finalement il ne faudrait pas s’alléger de plusieurs de ces entreprises (Etats).

Le tout est à traiter de surcroît sans la présence d’un tribunal puissant pour aider à l’élaboration et à l’acceptation d’un plan de redressement ; un tribunal sous l’autorité duquel tous les créanciers seraient contraints d'accepter les plans d'apurement et de redressement élaborés en concertation avec la majorité des créanciers et validés par ce tribunal. On voit difficilement ce rôle joué par le FMI alors qu’il ne peut même pas le faire dans les pays en développement malgré une trentaine d’années d’interventions.

Comment espérer voir les sociétés périphériques se remuscler quand le cœur du groupe va réduire les achats de biens et services qu’il effectuait précédemment, que les autres clients (pays) habituels sont en train de réduire les leurs pour réduire leurs déficits publics et de balance commerciale? Et cela sans pouvoir baisser les prix à l’exportation (fixité de la monnaie, l’euro) et en supportant des prix augmentés à l’importation (suite à la baisse du pouvoir d’achat décrété –dévaluation interne-) et ce, d’ailleurs sur une assiette fortement élargie puisque portant aussi sur les importations intra-groupe (intra-européenne, c’est à dire par rapport aux pays du centre). La dévaluation interne décrétée ne peut se traduire que par une baisse très forte de la masse salariale (20 à 25 % ) et par des réductions d’effectifs qui, contrairement au secteur privé, dont la charge ne peut pas être reportée sur la collectivité, puisque dans le cas des Etats, ils sont cette collectivité ! Les dettes publiques et sociales y perdront en assiette imposable, et la baisse autoritaire des prix est plus facile à décréter et à appliquer aux salaires publics voire au secteur privés qu’à faire respecter pour la plupart des prix à la consommation mais aussi pour les mensualités de crédit accession à la propriété ou à la consommation pour ne parler que des ménages. Comment réduire ces charges d’intérêt vis-à-vis de banques qui ont beaucoup emprunté à un taux donné sur les marchés auprès de résidents mais aussi de non résidents pour accorder ces crédits aux ménages mais aussi aux entreprises: la dette internationale privée serait-elle aussi touchée ?

Comment espérer voir des créanciers faire massivement l’échange de titres préconisé – 40% de décote, les 60% restants assortis d’intérêts différés mais garantis par un (ou deux ?) chef(s) de file dont on rappelle que le plus important ne sent pas forcément en charge de l’avenir du groupe, en tout cas pas à n’importe quel prix… et que le second, si la question se posait vraiment lui, pourrait se trouver devant les mêmes difficultés … à supposer qu’il en ait les moyens financiers …

Les risques juridiques (inconstitutionnalité) et politiques majeurs pourraient faire douter les créancier de franchir le pas et procéder à cette conversion tant ils pourraient douter de l’indéfectibilité de l’engagement pris. Et d’ailleurs pourquoi faire ce saut maintenant alors que de facto avec le plan de 750 milliards d’euros ils sont garantis à 100 % pour les encours actuels et que de surcroît les inquiétudes présentes leur permettent d’exiger des primes de risques très élevées, d’alimenter de fructueux arbitrages sur le marché des CDS, alors que ces Etats ne feront pas défaut – à l’exception éventuelle du cas très particulier de la Grèce- mais qui ne pèse pratiquement pas dans la dette globale de la zone euro. On peut même penser que la prime de risque pour 100 % des financements nouveaux resterait forte même avec 60 % garantis dans la mesure où le risque marginal sur les 40% additionnels (« honorée que si les réformes marchent ») n’est pas réellement maitrisé et qu’une signature s’apprécie dans sa globalité et éventuellement celle de ses garants.

Certes, ces Etats de la périphérie – à géométrie très variable - pourront traîner 10 ans et plus avant d’absorber réellement les effets de la crise, à l’instar du Japon. Ils essaieront ainsi de réduire très progressivement leur insuffisante compétitivité en reconduisant politiques de rigueur sur politiques de rigueur,mais les dettes seront honorées ; les efforts seront pour l’essentiel portés par les services publics et les ménages des différents pays concernés. Car il faut croire en effet que l’euro, comme la femme de César, ne peut pas rester la monnaie du cœur de la zone sans être insoupçonnable. Les marchés peuvent donc, me semble t-il, continuer à jouer leur jeu actuel pendant de nombreuses années.
        
Les observations et questions énoncées ci-dessus le sont sans doute par manque de compétence et d’informations complémentaires, sans doute de mon fait.

Elles ne visent aucunement à dénigrer l’idée forte que comporte cette proposition et que je partage, à savoir « faire participer les investisseurs privés au financement et aux risques des réformes ». Comme l’auteur, j’aimerais pouvoir dire que « c’est je crois beaucoup mieux que les plans de rigueur d’aujourd’hui - aveugles et sans espérance ».


Peut-être voudra t-il nous en dire davantage ? Peut-être que d'autres analyses de lecteurs pourraient venir compléter ces questionnements ou au contraire aider à nourrir la proposition de Jacques Delpla.

Liens externes: 


Jacques Delpla "Europe : échange dette "bleue" et dettes "rouges" contre réformes" / Blog LesEchosnoclastes

lundi, 16 février 2009

Risque pays dans la zone euro


Le Blog Directeur Financier - DFCG-  le 16 février 2009   Par Michel CASTEL

Association nationale des directeurs financiers et du contrôle de gestion


Des écarts de spreads grandissants entre les pays de la zone euro, la dégradation de la signature de plusieurs d’entre eux par les agences de notation et l’approfondissement de la crise font que le risque d’éclatement de la zone euro est une question qui n’est plus taboue depuis mi-janvier.

Le 29 janvier, le Gouverneur de la BCE a certes tenu des propos rassurants sur BFM en indiquant que « la crise actuelle ne présente pas de risque d’éclatement de l’euro ». Cependant, la crise n’a pas dit son dernier mot et on ne voit pas pourquoi les marchés ne continueraient pas à tester le degré de solidarité des 27 pays de l’Union et plus précisément celle du sous-ensemble des 16 pays constituant la zone euro.


Or celle-ci a bien du mal et aura bien mal à se manifester ; on se limitera à deux points pour l’illustrer. D’abord, l’idée d’emprunt(s) groupé(s) qui témoignerait de cette solidarité a été repoussée plusieurs fois par différents responsables au motif clairement explicité le 2 février par le Gouverneur de la Bundesbank « qu’il atténuerait le caractère disciplinant des marchés financiers et que l’engagement de chaque pays à tenir en ordre ses propres finances publiques est un élément clé de la constitution de l’Union Européenne ». Ensuite, la zone euro ne peut pas a priori compter sur un refinancement des pays membres par la BCE, en raison de l’article 104 du Traité de Maastricht qui l’interdit à la BCE et aux autres banques centrales nationales, contrairement à la Fed pour les Etats-Unis.


Or l’essentiel des besoins de financements additionnels des Etats, tant en Europe que dans presque tout le reste du monde, vient du mauvais fonctionnement des marchés et du crédit et ce, malgré les soutiens publics massifs apportés au secteur financier. Dans le même temps, ce dernier continue bien entendu à disposer de l’intégralité des dépôts et titres existants de l’ensemble des agents économiques ou en cours de création par l’injection des concours publics. Alors pourquoi ne pas assurer une partie du refinancement des Etats boudés par les marchés par l’instauration d’un plancher de bons du Trésor (BT) auprès des banques de chaque pays en fonction de leurs dépôts ? C’est un dispositif qui a fonctionné notamment en France (jusqu’en 1966) quand après la dernière guerre mondiale les Etats étaient une source essentielle du financement des économies et ce jusqu’à la montée en puissance des banques puis des marchés dans les différents pays. Les banques détiennent déjà spontanément une part importante des dettes publiques: il s’agirait qu’elles n’en baissent pas l’encours et qu’elles l’augmentent de 3 à 4 % ou de 4 à 5 % de leurs dépôts selon le poids de ceux-ci dans les PIB nationaux pour couvrir tout ou partie des déficits liés à la crise. Ces BT sont pour elles des emplois rémunérés, sans risque, non consommateurs de fonds propres et pouvant servir de collatéral pour un éventuel refinancement auprès du Système Européen de Banque Centrale (SEBC). Si les marchés renouvelaient le niveau de leurs encours actuellement souscrits, le bouclage financier des dettes publiques des pays de la zone euro pourrait être presque assuré sans le concours direct, si ce n’est assez marginal, du SEBC. Politiquement de telles interventions directes très limitées des banques centrales de la zone euro devraient réduire la crainte de « la planche à billets ». Cela devrait permettre plus facilement d’obtenir l’accord unanime des 27 pays de l’Union nécessaire pour avoir une lecture ouverte du traité de Maastricht et de rassurer les marchés.
Il est de l’intérêt général d’envisager des dispositifs de ce type pour prévenir, le cas échéant, les possibles conséquences désastreuses d’un processus extrêmement dangereux de surenchère dans la recherche de primes de risque sur tous les Etats de la zone euro– y compris les plus solides- pour voir jusqu’où on peut aller. On le sait maintenant, les risques systémiques, même les plus improbables, existent quand on les alimente. On ne sait pas quand ils peuvent éclater mais ils finissent par éclater… et on commence à en connaître le prix.


Nota : un article plus complet sera publié par l’auteur fin mars-début avril dans Euredia, Revue européenne de droit bancaire et financier, Editions Bruylant, 2009.1