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jeudi, 7 février 2013

Pictet et Lombard Odier mettent fin à plus de deux siècles de tradition suisse

Les Echos du 7/02/2013 - Frédéric Thérin , correspondant à Munich

Les deux banques genevoises abandonnent leur statut de société de personnes.

Commentaire :


Conclure comme le fait le magazine "Bilan" en disant "c'est une révolution culturelle, une ouverture vers un monde transparent, celui du XXI ème siècle " est incroyablement simpliste.
Gageons que si les Goldman Sachs (en 1999) et autres investment bank américaines à la même période étaient restées avec leur statut de partnership et n'étaient pas rentrées en bourse on n'aurait pas eu les dérives que l'on a eues par effet de contagion.

Si le nouveau statut de Pictet et Lombard Odier va leur demander plus de transparence, comme le demande par ailleurs une cotation en bourse, c'est de bien de peu de poids par rapport à l'affranchissement de la responsabilité indéfinie des actionnaires dans la prise de risques. Surtout quand ce changement de statut permet, avec l'argent des autres, de faire des effets de levier comme seule la finance permet de le faire dans le développement des opérations, la prises de risques et l'amplification des bonus et des résultats.


mercredi, 20 juillet 2011

Réguler en informant

article de David Thesmar et Augustin Landier- Blog DFCG- Le blog du directeur financier - 13 juillet 2011

Dans l’économie moderne, réguler c’est rassembler de l’information, puis la diffuser le plus largement possible. La crise financière de 2008 est selon nous l’illustration de ce principe. Car nous analysons cette crise comme une crise de l’opacité. Dans un secteur comme la finance, où la production et le traitement de l’information sont au cœur du métier, l’opacité a des effets catastrophiques. Aux États-Unis, les patrons de banques et les régulateurs en charge de les surveiller ont laissé filer le niveau de complexité du système financier...

mon commentaire :

Les auteurs disent analyser la crise actuelle « comme une crise de l’opacité ».
Et de citer notamment Robert Rubin disant « qu’il était impossible de savoir l’ampleur des risques pris sans être dans la salle de marchés ».

Et bien non, je dirai que derrière l’opacité -et la complexité- invoquée comme cause de la crise se cache en fait la volonté du plus grand nombre de ne pas voir, de ne pas savoir, selon l’adage bien connu qu’il n’y a de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.
Qu’on ne dise pas que les dirigeants et les principaux responsables de banques, de fonds d’investissement ou d’assurances ne savaient pas ce qui était derrière la source majeure des résultats de leur entreprise, de la valeur de leurs stock- options et de leurs bonus ? Tant que c’était hyper profitable, ils ne souhaitaient s’interroger. Les autorités de marché, les superviseurs et les banquiers centraux ne savaient pas la dérive phénoménale de Ia montée généralisée des endettements et des effets de levier l’accompagnant ? Bien sûr que si. D’ailleurs, si le 9 août 2007 chacun des grands groupes bancaires n’a plus voulu faire confiance à personne sur le marché interbancaire c’est que chacun savait ce qu’il avait comme risques dans son fonds de commerce et qu’il savait que tous ses confrères en avaient autant dans le leur. C’est bien pour cela que les banques centrales sont intervenues aussi rapidement et aussi massivement dès ce jour-là. On pourrait multiplier les exemples. Certes les économistes manquaient sans doute d’informations financières fines pour tirer les sonnettes d’alarme ; encore que, s’ils avaient été attentifs aux chiffres de la BRI, à ses commentaires et ses rapports annuels ; aux données financières et comptable des agences américaines Fannie Mae et Freddie Mac depuis début 2005… ils auraient pu exprimer des inquiétudes fortes.
Non, si les acteurs, les analystes et les observateurs en tout genre n’ont pu vu les éléments de montée inexorable des risques c’est qu’ils ne voulaient pas les voir. Tous étaient en effet convaincus que les marchés étaient le canal optimum de l’allocation des capitaux et de la gestion des risques. Même s’ils ne l’étaient pas intimement ils ont agi, régulé, supervisé, commenté, comme s’ils l’étaient. Ceux qui dénonçaient la fuite en avant dans la dette publique et privée, la procyclicité de la comptabilité et des ratios prudentiels, la trop grande déconnexion du réel et du financier, la dissémination des risques auprès d’entités non régulées, ceux-là étaient considérés comme des passéistes et/ou des régulationnistes attardés. D’ailleurs, la croissance mondiale était là pour les contredire ; jamais autant d’argent n’avait été aussi bien employé aux quatre coins de la planète, disait-on…
Tous munis de bonnes informations les choses changeraient-elles ?
Il me sera permis d’en douter. .. Ne serait-ce qu’au vu de ce qui continue à se passer. On sait (presque) tout sur tout après les stress tests, le décorticage des dettes publiques et de leurs porteurs, sur les principaux opérateurs sur CDS, … et on ne peut pas dire qu’il y ait de meilleures analyses sur l’agir à très court terme ou sur le souhaitable à moyen-long terme.
Certes les auteurs ont parfaitement raison de demander à ce que davantage d’informations soient publiées… et des informations pertinentes. C’est un élément important pour limiter les risques de capture du régulateur très justement signalé, comme celle du législateur et des politiques en général. On ne peut que les rejoindre sur ce point. Mais de là à penser que cela serait la panacée, c’est un pas que je ne franchirai pas.


Tant que les analyses portant sur le bon usage de la finance moderne resteront aussi simplistes, voire aussi biaisées (le « tout marché » pour les uns, le presque tout financier interdit ou très corseté pour les autres) on peu douter de la bonne utilisation qui pourra être faite des données publiées. Des réflexions majeures sur les conditions d’une bonne articulation intermédiation bancaire-marchés sont notamment à mener d’urgence. Tant que les puissants intérêts en place prévaudront (et sur ce point le lobby bancaire américain est très remarquable), ils sauront convaincre qu’on ne peut faire autrement, sauf à tuer la croissance. Si ce n’est les mêmes, d’autres diront enfin, plus réalistes ou plus cyniques, que de tout façon, bonne régulation ou pas, bonne information ou pas, les crises sont inéluctables, voire souhaitables car accoucheuses de forces nouvelles.