Publié sur Linkedin le 6 septembre 2019
« Le changement climatique doit être intégré au sein des objectifs de la BCE » délaré Madame Lagarde devant le Parlement Européen le 4 septembre 2019.
Ce que Mario
Draghi, malgré sa politique monétaire disruptive, n'aura pas su - ou voulu -
faire, à savoir engager résolument la BCE à aider au développement des
financements verts, son successeur, Madame Christine Lagarde, a dit vouloir le
faire lors de son audition devant le Parlement Européen ce mercredi 4
septembre.
« Le changement climatique doit être intégré au sein des objectifs de la BCE »,
a-t-elle déclaré, précisant qu'à ce stade qu'il ne peut s'agir que d'une
position personnelle. « La stabilité des prix reste l'ancrage absolu de la BCE,
son objectif premier. L'environnement peut faire partie des objectifs
secondaires », a-t-elle déclaré, en référence à l'article 127 des traités sur
les prérogatives de la BCE (référence toujours écartée jusqu'à présent par les
responsables de la BCE, Benoît Coeuré excepté il y a quelques mois).
Elle précise qu'Il faut déterminer ce qui est green et ce qui ne l'est
pas. Si la taxonomie (la définition) des actifs verts est adoptée, elle se
superposera au principe de "neutralité de marché" (c'est-à-dire de
non orientation, de non intervention dans les choix de financements opérés par
les différents acteurs économiques).
Elle a également évoqué la prise en compte des actifs verts dans la
pondération des risques utilisée dans la détermination des ratios de capitaux
des banques comme le proposent la Commission sortante et les banques françaises
notamment avec le concept de « green supporting factor ».
Pour revenir, et se limiter à la politique de refinancement, tout est
prêt conceptuellement pour que le pourtour de ce qui relève de la notion de
financements verts soit arrêté. Il reste la volonté politique et
institutionnelle de bien vouloir commencer à lui donner corps, ce que le marché
des green bonds a déjà largement fait sur des bases privées, même s'il reste
quelques ambiguïtés sur certaines opérations un peu anciennes ou un encore un
peu floues.
C'est le moment donc d'enfin réemployer les tombées des obligations acquises
avant janvier 2019 dans le cadre des politique de quantitative easing (QE)
dans des obligations et autres titres de créances négociables vertes, ce qui
n'a pas été fait, la BCE continuant de refinancer Etats, banques et grandes
entreprises à l'aveugle, y compris pour des concours carbonés.
Il n'es pas concevable qu'une possible réactivation de cette politique de
QE continue cette fausse neutralité régulièrement mise en avant pour ne
pas faire ce ciblage. Pas plus que ce n'est concevable de lancer, peut-être
très prochainement, de nouveaux prêts bancaires à long terme (TLTRO); annonce
de la BCE du 4 avril 2019 qu'elle lancerait ces nouveaux prêts en septembre
prochain.
Certes, la montée en puissance de ces refinancements verts ne pourra être que
progressive. Mais s'ils pouvaient être ouverts à de portefeuilles de crédits
bancaires verts non titrisés, mis en place par exemple depuis janvier de cette
année, le champ en serait considérablement élargi à des financements de petits
montants du secteur privé tout aussi importants et efficaces que les grosses opérations
d'investissement (via la BEI notamment) pour diffuser aussi vite que possible
les économies d'énergie, le financement des énergies renouvelables, le
traitement de la pollution, des déchets, la conversion des agriculteurs à une
agriculture biologique...
Pour booster l'offre de ces crédits, la BCE devrait non seulement ne pas
augmenter à due concurrence - à l'euro, l'euro- les réserves à taux négatifs
demandés aux banques sur les dépôts ( ce qui est évoqué comme une prochaine
mesure possible)- mais, au contraire, les supprimer complètement. Ces
crédits verts trouveraient ainsi un attrait pour les banques qui seraient alors
bien davantage disposées à en faire offre auprès de leurs
clientèles.
PS : des éléments beaucoup plus précis sur toute cette problématique
peut être retrouvés sur ce site dans mon article " Refinancements BCE: une
formidable opportunité pour financer le transition énergétique et climatique
" du 17 octobre 2018
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Article également publié le 24 septembre sur Le Cercle-Les Echos sous le titre
" Comment mettre la BCE au vert "
LE CERCLE - Christine Lagarde veut intégrer le changement climatique au sein des objectifs de la Banque centrale européenne. Dans un texte, Michel Castel imagine comment l'institution monétaire pourrait booster l'offre de crédits verts.
Vous pouvez le consulter sur https://www.lesechos.fr/idees-