Le Cercle-Les Echos

article publié le 08/06/2010

 

Résumé : Suite à l'article de M. Stiglitz on peut penser que la capture des régulateurs serait moindre si l'information du public était vraiment faite en amont sur le fond des réformes. Pour les cas les plus difficiles ou sensibles un Conseil Scientifique serait une véritable avancée pour une information plus objective.



M. Stiglitz dans son article "Re-régulation financière et démocratie"attire à juste titre l’attention sur le fait que les lobbies du secteur financier oeuvrent avec force afin de s’assurer que les détails des nouvelles régulations fonctionnent dans le sens de leurs  intérêts. Il y aurait en effet en quelque sorte une certaine forme de capture des régulateurs.

Comment pourrait-il en être autrement puisque les citoyens, même parmi les plus avertis et la plupart des responsables politiques, économiques et sociaux n’ont pas connaissance du contenu réel des réformes, de leur impact probable.

Le plus souvent il s’agit en effet de textes très complexes et très longs et qui de plus en plus souvent ne sont mêmes pas traduits ! Les résumés à l’intention du public se limitent à  l’exposé très bref de principes (rarement discutables il est vrai) mais dont on ignore pratiquement tout de l’application. Faute sans doute de moyens, de sources d’information et de compréhension poussée au fond, universitaires, économistes, journalistes spécialisés et autres experts présentent très rarement une analyse critique solide et compréhensible pour le plus grand nombre desdits projets  Au total, seul un  petit cénacle directement concerné en connaît le tréfonds et peut effectivement influencer fortement le résultat final dans la plus grande des discrétions.

Deux exemples Le premier vise le fait  qu’on a pu seulement tardivement (et avec la crise comme révélateur) constater le traitement prudentiel  particulièrement favorable qui avait été pour les opérations de marchés dans Bâle 1 comme dans Bâle 2 comparé aux exigences de fonds propres demandés pour les crédits aux entreprises tout particulièrement. Maintenant quelques cabinets ou experts nous disent qu’avec Bâle 3  les fonds propres exigés pour ces opérations de marché pourraient être multipliées par 3. Certes, mais par rapport à quelques chiffres de départ ? Multiplié par 3 sur trois fois rien, cela ne fait toujours pas grand-chose … Est-ce le cas ? Qui en a réellement idée en dehors du cénacle précité ? 

Deuxième exemple : Comment s’y retrouver par rapport aux conséquences possibles sur le financement des économies de la prochaine réglementation prudentielle? Selon Mc Kinsey l’application des nouveaux ratios de fonds propres nécessiterait entre 500 et 1000 milliards de dollars, davantage encore selon la BNP, soit près de 6% de croissance à moyen terme, alors que le Président du Comité de Bâle, Gouverneur de la Banque des Pays-Bas, estime ce coût à 0,5 à 1 %  de croissance sur les prochaines années. Serait-ce la fin de la capture des régulateurs ?

Qui croire ? Les régulateurs sur-réagissent-ils? Sur quelles hypothèses d’allocation des fonds propres selon les activités les banques  avancent- elles ces chiffres et ces risques pour la croissance ?

Plus de démocratie supposerait sans doute ici la constitution d’un conseil scientifique international de très haut niveau, suffisamment représentatif de la diversité économique et sociale des pays membres du G20 pour avoir un avis le plus indiscutable possible.

Plus de démocratie, en sus des analyses de M. Stiglitz, c’est donc tout un travail de transparence et d’information en amont des  réglementations à mettre en oeuvre. C’est  aussi dans les cas les plus difficiles ou sensibles, l’appel à un « club des sages »  susceptibles d’éclairer le plus loyalement les décideurs et le public.